L’éclatement de la Grande Guerre est synonyme pour la région du départ de nombreux étrangers, subitement privés d’emploi ou contraints de répondre à l’appel à la mobilisation de leur pays d’origine, y compris lorsqu’ils sont, comme les Suisses et temporairement les Italiens, citoyens d’un pays neutre. Dans le même temps, des sujets appartenant aux puissances ennemies, dont les Alsaciens-Lorrains non réintégrés dans la nationalité française, sont éloignés de la zone des armées voire internés dans des camps dits de « concentration » réservés aux civils, majoritairement situés dans le Sud et l’Ouest de la France. Après quelques mois de conflit, l’épuisement des munitions rend toutefois indispensable, à l’échelle nationale, la mise en place d’une véritable mobilisation industrielle. Or la Bourgogne et la Franche-Comté, fortement industrialisées et situées en retrait du front, en constituent un des hauts lieux. Après un nécessaire temps d’adaptation, les usines de la région participent ainsi très largement à l’effort de guerre, alors que des artisans et des commerçants étrangers continuent à assurer, non sans difficultés le ravitaillement de la population des civils et des militaires. Les industriels, les agriculteurs ou les exploitants forestiers ou miniers font alors appel à tous les gisements de main-d’œuvre disponibles, en provenance d’Europe, de l’espace colonial (Maghreb et Indochine) voire de Chine. Des soldats ou d’anciens soldats canadiens, américains ou russes apportent aussi leur force de travail. Parallèlement des combattants étrangers et coloniaux en repos ou devant s’entraîner et s’acclimater avant de partir au front stationnent en Bourgogne et en Franche-Comté selon des temporalités variées. Les soldats américains édifient enfin plusieurs hôpitaux militaires dans la région.
Stéphane Kronenberger
