La cinquantaine et l’accent slave : pas de travail

Je suis d’origine russe. Je suis née en Abkhazie. J’ai la cinquantaine et je suis installée à Besançon depuis 2000.


Lorsque j’avais dix ans, ma famille a déménagé dans une grande ville industrielle de la Fédération de Russie. Dans mon pays, j’ai obtenu un diplôme d’enseignante en anglais, je n’ai jamais travaillé dans un établissement scolaire, mais dans une bibliothèque, puis comme secrétaire dans une université d’Etat jusqu’à mon arrivée en France.

Quelles sont les raisons qui vous ont conduite à venir en France et plus particulièrement à Besançon ?
Mon histoire est une histoire d’amour. J’ai rencontré mon mari alors que je séjournais chez ma copine Russe à Besançon en 1999. On s’est mariés en 2000 et depuis je réside à Besançon.

Et avec l’administration française comment cela s’est passé ?
Ca s’est très bien passé. Je suis venue avec un visa touristique de trois mois en apportant tous les papiers nécessaires pour le mariage. A l’expiration de mon visa, j’ai eu un titre de séjour d’un an. Lors du renouvellement de mes papiers, la Préfecture m’a proposé d’opter pour une carte de résident de dix ans ou la nationalité française. A cette époque, je ne savais pas si je pouvais avoir la double nationalité et comme je ne voulais pas perdre ma nationalité russe j’ai opté pour la carte de résident. C’est en 2006 que j’ai fait les démarches nécessaires pour la naturalisation et je suis devenue française en 2007.

Quand vous êtes arrivée, vous parliez français ?
Pas du tout et pendant un an je ne parlais qu’en anglais avec mon entourage. Petit à petit, j’ai commencé à parler le français.

Vous avez pris des cours de français dès votre arrivée en France ?
Non parce que je ne savais où je pouvais prendre des cours, mon mari non plus. Ce sont certains Russes qui m’ont orientée vers l’IFPA. Pendant un an j’y ai appris la langue et la civilisation française. J’ai été à la FRATE, puis j’ai suivi une formation de mise à niveau à l’AFPA. Aujourd’hui, je maîtrise le français et je me perfectionne constamment : je lis des livres, des articles, je note de nouveaux mots et expressions.

L’apprentissage du français vous a aidé à prendre de l’assurance ?
Oui, parce qu’au début je ne comprenais rien et ça me gênait beaucoup de ne pas pouvoir m’exprimer. J’étais toujours accompagnée de mon mari pour mes démarches administratives. Il me fallait tellement de concentration pour comprendre ce que les gens disaient et pour leur répondre. C’était très fatiguant. Une fois le français maîtrisé, je me suis sentie plus à l’aise et je n’ai pas de souci de communication.

Et pour la recherche d’emploi comment ça se passait ?
Les premières années, j’ai fait du repassage, de la retouche pour vêtements et je gardais des enfants. Dès que j’ai maîtrisé la langue française, j’ai commencé à rechercher un travail convenable, mais les contrats d’accompagnement proposés par l’ANPE se sont mal passés. Chaque fois que je me présente pour une offre d’emploi on me dit que le poste est déjà pourvu. Actuellement je suis en accompagnement avec le PLIE et j’espère un résultat positif.

On ne vous a jamais fait sentir que votre accent étranger ou votre âge posait peut-être problème ?
J’ai pensé qu’on me refusait probablement à cause de ça. Par exemple lorsque ma référente de l’ANPE m’a téléphoné pour une offre, elle m’a prévenu que l’employeur était inquiet parce que je suis Slave !!!!!!!

Est-ce que l’ANPE vous a proposé une formation en français ou une formation professionnelle ?
Non jamais !

Dans votre vie sociale comment vous sentez-vous ?
Je n’ai pas de souci avec la société en général. J’aime bien parler avec les gens, me réunir avec d’autres femmes et faire des choses ensemble, mais ça me gêne beaucoup de ne pas pouvoir m’exprimer comme je peux le faire en russe, utiliser les subtilités de la langue mais la fréquentation des Espaces solidaires du CCAS qui sont très conviviaux m’aide à parler et donc à parfaire progressivement mon français.

Et par rapport à vous même comment équilibrez-vous votre partie russe avec votre partie française ?
Je suis Russe bien intégrée et ayant la mentalité de mon pays je me sens à l’aise et très intégrée dans la société française. Je suis tolérante et si un problème se pose, j’analyse la situation pour comprendre ce qui n’a pas été. Parfois quand les situations ne sont pas simples, il vaut mieux ne pas réagir et ne pas provoquer les conflits. Je suis devenue française en gardant mon âme russe et je ne crois pas que mon identité ait changé.

Qu’est ce qui fait la mentalité russe ?
J’aimerai noter que le caractère national russe, « l’âme de tous », c’est la patience, l’hospitalité, la foi, l’ouverture, la volonté face à la souffrance et enfin la compassion qui donne naissance à la bonté et à la douceur. La vie est dans les cœurs plutôt que dans les règles. C’est aussi la facilité de communiquer sans condition avec des personnes. Enfin, l’entraide désintéressée. Ce qui me fait mal au cœur, c’est l’alcoolisme très répandu en Russie.

Est-ce que vous avez des liens particulièrement resserrés avec la communauté russe ?
J’ai des liens d’amitié avec des gens de l’ex URSS (Ukraine, Géorgie, Biélorussie). On se rappelle régulièrement, échangeons des nouvelles, des informations pratiques. Il y a comme une sorte de réseau de solidarité entre nous.

Anonyme

12 octobre 2008

Témoignage recueilli par Farida Touati pour le site Miroirs de femmes, reflets de quartiers .

Russie

Besançon, France

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