Esclavage et colonisation

Situation d’un homme privé de liberté, qui est devenu la possession d’un autre homme qui peut faire de lui ce qu’il veut,


et notamment le faire travailler sans aucun salaire, l’obliger à combattre, le contraindre à des relations sexuelles, le vendre, le punir, parfois jusqu’à la mort.

1) L’esclavage

a) Définitions :

L’esclavage est également un mode de production, un système économique , lorsque, dans une société donnée, une grande part de la production (travaux agricoles, industriels, artisanaux, domestiques) est assurée par des esclaves. Parfois plusieurs modes de production coexistent ; ainsi aux Etats-Unis d’Amérique, avant la guerre de Sécession (1861-1865), le Sud était une société esclavagiste tolérée par les Etats du Nord. La richesse du Sud était fondée sur l’esclavage des Noirs, notamment dans les plantations de coton, tandis que le Nord était une société capitaliste utilisant le système du salariat (ouvriers industriels ou agricoles recevant un salaire en échange de leur travail).

b) De nombreuses civilisations ont connu l’esclavage, avec presque tous les cas de figure :
– Blancs esclavagisés par Blancs. A Athènes, dans la Grèce antique, la société était divisée en trois classes (citoyens, métèques, esclaves). A Sparte, toujours en Grèce, les Spartiates avaient droit de vie et de mort sur les hilotes (esclaves). Dans l’Italie romaine, on comptait de 40 à 50% d’esclaves.
– Noirs esclavagisés par Noirs en Afrique. On estime que leur nombre fut au XIX° siècle de 14 millions environ.
– Blancs esclavagisés par Arabes et Turcs. Ils furent peut-être 2 millions aux XV°-XVIII° siècles (Slaves, Circassiens, Méditerranéens razziés).
– Noirs esclavagisés par Blancs. On estime qu’environ 11 à 12 millions d’Africains ont été déportés vers les Amériques et les Caraïbes. La traite s’étendit du XV° au XIX° siècle, son apogée se situant au XVIII° siècle.
– Noirs esclavagisés par Arabes et Turcs. Cette traite entraîna la déportation de 15 à 20 millions d’Africains à travers le Sahara et par mer à partir de la côte est-africaine (Zanzibar). Elle dura du VII° au XIX° siècle, avec apogée au XIX°.

c) Repentance ici, négation là.
Les collégiens français connaissent le commerce triangulaire. Le Parlement français a reconnu officiellement (loi Taubira) que l’esclavage pratiqué par la France avait été un crime contre l’humanité.
En revanche, la mise en esclavage des Noirs par les Arabes et les Turcs est très mal connue. Elle a longtemps été niée par les Etats qui l’ont pratiquée (Maroc, Egypte, Arabie saoudite, Empire ottoman, Irak…). Aucune repentance d’aucun Etat arabe ou de l’Etat turc n’est envisagée. Les collégiens marocains ou saoudiens n’entendent pas parler de la traite orientale des Noirs.

d) Abolitions.
Les Etats européens abolirent l’esclavage entre 1833 (Angleterre) et 1888 (Brésil). La France l’abolit en 1794 mais Bonaparte, alors Premier consul, le rétablit en 1802. L’abolition définitive eut lieu en 1848.

e) En Afrique noire, la colonisation (anglaise, française) mit fin à l’esclavage vers 1880-1900.
Certains des chefs de tribus qui combattirent la conquête coloniale, comme Samory Touré, étaient des esclavagistes actifs. Ainsi le colonisateur européen, tout en installant une oppression nouvelle, la sienne, qui s’accompagnait souvent du travail forcé, mettait fin à cette ancienne forme d’oppression qu’était l’esclavage entre Africains. Un oppresseur-libérateur : c’est difficile à comprendre aujourd’hui.

2) La colonisation

a) La colonisation fut  d’abord une conquête comme tant d’autres (Rome, Alexandre, les Arabes, les Mongols…). Mais cette conquête-là, celle du monde extra-européen par les Européens, fut presque totale (118 millions de km2 sur 144 de terres émergées) , et dura quatre siècles et demi, de 1492 (Christophe Colomb) à 1935 (Mussolini en Ethiopie).
Toute l’Afrique, toute l’Amérique, toute l’Océanie et une grande partie de l’Asie furent, à un moment ou à un autre, colonisées par des Européens.
Ne furent pas colonisés : le Japon, la Chine (sauf une partie de l’Est), la Turquie, l’Iran, l’Afghanistan, la Thaïlande.

b) 22 pays aujourd’hui indépendants ont été des colonies ou protectorats français.
Le Vietnam, le Laos, le Cambodge, qui formaient l’Indochine française.
Madagascar.
Djibouti.
Le Congo-Brazzaville, le Gabon, le Cameroun, la République centre-africaine (ex-Oubangui-Chari), le Tchad, qui formaient l’AEF (Afrique équatoriale française).
La Mauritanie, le Sénégal, le Mali (ex-Soudan français), le Niger, la Guinée-Conakry, la Côte d’Ivoire le Burkina-Faso (ex Haute-Volta), le Bénin (ex Dahomey), le Togo, qui formaient l’AOF (Afrique Occidentale française).
L’Algérie (terre française) et le Maroc et la Tunisie (qui étaient deux protectorats) formaient l’AFN ( Afrique française du Nord).
Notons qu’entre les deux guerres, le Liban et la Syrie furent soumis à la France dans le cadre d’un mandat que lui avait confié la SDN (Société des nations).

Toutes ces colonies furent conquises entre 1830 (Maroc) et 1912 (Maroc). Toutes sont devenues indépendantes entre 1954 et 1962 (sauf Djibouti, 1977). Toutes les ex-colonies d’Afrique ont conservé la langue française comme langue de culture et d’administration, ce qui explique en grande partie les flux migratoires actuels.
En partie seulement puisque, depuis 20 ou 30 ans, les flux se sont totalement mondialisés : les Turcs, les Kurdes, les Tamouls du Sri-Lanka, les Kossovars….ne viennent pas de l’ancien empire colonial français.

c) Il faut distinguer colonisation et esclavage.
La colonisation fut oppressive
 : les pays colonisés se sont retrouvés dirigés par les métropolitains ; il y avait la plupart du temps une absence de libertés politiques, une imposition de la langue française, parfois spoliation de terres, une imposition du travail forcé en Afrique noire de 1880 jusqu’en 1946 (date de son abolition), sans oublier un mépris fréquent pour l’ « indigène », mépris qui pouvait prendre un tour raciste.
Mais la colonisation ne fut pas une mise en esclavage. La métropole apporta certains progrès, hôpitaux, dispensaires, chemins de fer, routes, ponts, ports enseignement (écoles et lycées ont existé, et on n’y trouvait pas que des enfants de colons). Une élite indigène (Gandhi, Bourguiba, Senghor, Giap, Senghor…) se dégagea, qui retourna contre le colonisateur les principes démocratiques qu’il enseignait, paradoxalement, dans ses écoles. Par ailleurs, les colons ont souvent aimé ces pays, et une partie d’entre eux ont aimé leurs habitants et leur culture.

Contribution de Pierre Kerleroux, automne 2008

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