La gare Viotte était le premier lieu d’accueil de la ville de Besançon. Dans les années 50 (reconstruite en dur en 1963), elle était en bois, ainsi qu’en témoigne M. Salah
« Après la mort de son père, Salah a demandé les papiers pour venir travailler en France.
Il avait 18 ans.
Il a pris le car pour Constantine, puis a dormi sur un port et s’est embarqué sur un vieux rafiot qui l’a débarqué à Marseille 48 heures après.
Ils étaient 5 dont un seul parlait le français.
Ils sont repartis de Marseille par le train du soir à 19 heures.
C’était en avril 58.
En s’éloignant du port, ils pleuraient.
Le train s’arrêtait à toutes les petites gares.
Ils sont arrivés à 5 heures du matin à la gare de Besançon qui était encore en bois.
Salah a pris son premier café : « Ça n’avait pas le goût de l’Algérie ! ».
A l’époque, il n’y avait pas Palente, Montrapon, Planoise.
Eux, ils avaient des bérets noirs sur la tête.
Au foyer Saint-Ferjeux, tout le monde dormait.
Il y avait des chambres de 4 ou de 6, mais parfois, ils étaient 14 dans une pièce de 10 m2, avec des matelas par terre.
En 1950, les premiers arrivés couchaient parfois dans des wagons.
Le matin, ils se réveillaient tous noirs car le plancher était encore recouvert de charbon.
Une fois, ils se sont retrouvés à Belfort, car le wagon a été accroché par une locomotive dans la nuit. »
Extrait de l’ouvrage “D’une rive à l’autre” d’Eugénie Poret Czorny publié en 2005 à l’initiative du Centre Communal d’Action Sociale de la Ville de Besançon.