C’est tellement difficile quand on arrive et qu’on ne connaît personne

Madame D. originaire du Sri Lanka est arrivée en France en 2002. Avant d’arriver à Besançon, elle habitait à Paris.
Quand madame D. a dû fuir son pays, elle est partie seule avec ses deux enfants de 7 et 5 ans. C’est grâce à leur famille, qui a organisé et payé leur voyage, qu’ils ont rejoint la France où un oncle les a accueillis.


A Paris madame D. est restée environ une semaine chez son oncle mais la maison était trop petite pour qu’ils vivent tous ensemble. Elle a déposé son dossier de demande d’asile et a été hébergée dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. C’était en février 2002, en novembre de cette même année la famille a reçu son statut de réfugié politique.
Début 2003, madame D. a dû intégrer un centre provisoire d’hébergement, structure d’accueil pour les réfugiés politiques. Madame D. ne souhaitait pas quitter Paris où elle se sentait en sécurité car elle était proche de son oncle et de nombreux compatriotes. Comme elle ne parlait pas français, elle était beaucoup aidée par cette communauté. Néanmoins elle n’a pas pu refuser la proposition de partir au CPH de Besançon et elle est arrivée dans notre ville en mars 2003 avec ses deux enfants alors âgés de 8 et 6 ans.

L’arrivée et l’installation à Besançon ont été difficiles. Madame D. avait peur, elle ne connaissait personne, ne parlait pas français et n’avait pas envie d’être là.
Au centre provisoire d’hébergement il y avait une assistante sociale pour l’accompagner dans toutes les démarches à faire, une formatrice pour l’aider à apprendre la langue. Elle y est restée pendant un an et demi, jusqu’à ce qu’elle soit suffisamment autonome pour vivre en logement indépendant.
Pendant ce temps elle a aussi fait les démarches de regroupement familial pour faire venir son mari qui était resté au Sri Lanka. Monsieur D. est arrivé en 2004.

Quand on demande à madame D. quelles difficultés elle a rencontré en arrivant à Besançon, elle cite spontanément et insiste sur la barrière de la langue et l’importance de parler français.
Madame D. a assez rapidement compris la langue française mais a eu beaucoup de difficultés à parler, lire puis écrire en français. Elle a donc participé à des cours au CPH, puis elle a fait un stage de trois mois à l’IFPA en 2005. Elle a ensuite travaillé pendant un an en contrat d’insertion aux Jardins de Cocagne, suivi encore deux actions de formation linguistique rémunérées à la FRATE en 2007 et 2008. En 2009 elle a bénéficié d’un stage alliant perfectionnement en français et recherche d’emploi.
Maintenant madame D. est satisfaite de son niveau en français : elle comprend, elle se fait comprendre, elle peut lire les courriers qu’elle reçoit et laisser des messages. Elle est autonome et n’a plus besoin que sa fille l’assiste…
Madame D. raconte aussi qu’elle a eu du mal à se repérer dans la ville de Besançon, à prendre le bus, à trouver les adresses qu’elle cherchait. Son expérience à Paris avec le métro lui semble plus facile. Elle dit aussi que les habitants de Besançon n’ont pas fait beaucoup d’efforts pour l’aider alors qu’elle s’exprimait mal. A Paris il y avait beaucoup d’étrangers, c’était plus facile de communiquer et même de parler en anglais.
Une autre difficulté énoncée concerne le fait de ne pas avoir de travail. Madame D. travaillait dans le commerce au Sri Lanka. Elle a eu une expérience de caissière dans un Casino pendant son dernier stage. Elle a aussi fait un essai en usine mais, à ce jour, elle est toujours sans emploi et elle souhaiterait vraiment avoir une activité professionnelle rémunératrice. Elle se rend compte que c’est difficile et parle de Paris où il lui semble plus aisé de trouver du travail.
Enfin la dernière chose qui lui manque, c’est un temple hindou pour pratiquer sa religion. Il n’y en a pas à Besançon… Quand elle va à Paris chez sa famille, c’est la première chose qu’elle fait : aller prier au Temple. Il manque aussi des magasins, des épiceries indiennes, et elle regrette que la petite communauté sri lankaise de Besançon ne soit pas soudée.
Quelques semaines après son arrivée, elle a rencontré par hasard, dans le bus, une famille du Sri Lanka installée à Besançon depuis une dizaine d’années. Quand elle a eu confiance en ces personnes, elle a accepté leur aide : ils lui ont montré les lieux importants, les magasins où il est intéressant et facile d’aller faire ses courses. Une jeune femme l’a aussi de temps en temps accompagnée à l’hôpital. Pour se soigner, parler avec les médecins, elle utilisait le plus souvent la langue anglaise. Les docteurs, les infirmières et les personnels de la santé qu’elle a rencontrés ont toujours été accueillants et gentils avec madame D. Cela s’est toujours bien passé même lorsqu’elle est restée plusieurs jours hospitalisée.

Concernant les loisirs, les sorties, la culture, c’est seulement depuis que ses enfants sont grands qu’elle en profite un tout petit peu. Quand les enfants étaient petits, elle ne voulait pas les laisser seuls quelque part et ils ne sortaient pas, ne faisaient pas d’activités.
Maintenant les enfants sont grands, il n’y a pas de problème. Ils vont au cinéma, au théâtre, à la bibliothèque. Et madame D. est même allée une fois au cinéma avec ses enfants.

Si elle accueillait quelqu’un qui arrive à Besançon, elle lui dirait que c’est une ville tranquille, où l’on vit tranquillement et où l’on peut trouver facilement un bon logement mais où il est difficile de travailler.
Elle dirait aussi qu’il faut apprendre le français car c’est indispensable.
Ses enfants font une belle scolarité. A leur arrivée à Besançon, ils ont intégré une classe « CLIN » avant d’aller dans une classe normale. Ils ont bien appris la langue française, et comme ils avaient commencé une école anglaise au Sri Lanka ils ont aussi un bon niveau en anglais. Ses enfants travaillent bien au collège et au lycée Ils sont sérieux, disciplinés et respectueux ce qui est aussi important pour madame D. que les résultats scolaires. Madame D. veut « la perfection » pour ses enfants… Depuis son installation à Besançon elle a toujours suivi la scolarité de ses enfants et elle pense que les enseignants ont été compréhensifs de leur situation, patients et à l’écoute quand elle parlait peu le français. Elle souhaite que ses deux enfants fassent des études qui leur plairont et qu’ils réussiront.

Madame D. serait d’accord d’accueillir et d’accompagner des personnes qui arrivent à Besançon pour les aider à trouver une assistante sociale, leur montrer les lieux utiles au centre ville, les magasins, la sécurité sociale,… «C’est tellement difficile quand on arrive et qu’on ne connaît personne ».
Madame D. se rappelle comme c’était dur pour elle quand elle est arrivée, elle avait peur de tout. Elle avait aussi tellement peur de se perdre qu‘elle n’est pas sortie pendant les quatre premiers jours… « La vie est si différente du Sri Lanka… pour toutes les choses c’est une nouvelle expérience ».

Entretien avec Madame D. Propos recueillis par Catherine Gallois – février 2011

Sri Lanka

Paris, France

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