Gladys, Uruguay, rencontre son futur mari en France

« J’ai été très heureuse de partir pour la France car notre connaissance de ce pays était artificielle via l’Ambassade et l’Alliance française. J’avais le choix entre trois villes : Paris, Caen et Besançon. »


Je suis née à Montevideo en 1943. Ma famille, immigrée italienne,  s’appelait Miraglia. Cette famille était de classe moyenne : mon père était commerçant et tenait une petite épicerie tout d’abord à la campagne puis en ville.

Je dois donner quelques explications sur ce pays peu connu. Il est formé actuellement essentiellement d’anciens immigrants, car lors de l’Indépendance en 1825, les autochtones du pays les indiens Charmas qui étaient des farouches rebelles ont tous été exterminés par les Espagnols. L’Uruguay est quinze fois plus petit que l’Argentine et quarante-cinq fois plus petit que le Brésil, ses voisins limitrophes. C’est le fleuve Uruguay qui fait frontière avec l’Argentine. Le pays a 3 millions et demi d’habitants dont 1 million et demi dans la capitale. Dans le pays une moitié est d’origine italienne et l’autre moitié d’origine espagnole, il y a cependant une petite minorité de Français, 5 %, qui cultive la vigne avec des cépages français et italiens.

Au pays je suis devenue professeur de français à Maldonado depuis l’âge de vingt et un ans au début comme remplaçante puis par la suite titulaire. J’aimais beaucoup la langue française à cause de sa sonorité, sa douceur, la beauté de ses mots. Pendant dix ans j’ai exercé ce métier. Et, en octobre 1975, j’ai pu obtenir une bourse du gouvernement français. Dans ma promotion cinq professeurs sont venus à Besançon. Sur ces cinq, deux sont devenues françaises par mariage.


J’ai été très heureuse de partir pour la France car notre connaissance de ce pays était artificielle via l’Ambassade et l’Alliance française. Pourquoi à Besançon ? J’avais le choix entre trois villes : Paris, Caen et Besançon. C’est le Crous qui a fait le choix. C’est en arrivant à Paris que j’ai connu ma destination : Besançon. Je suis arrivée la nuit à la gare et M. Chanard nous attendait pour nous conduire à la cité Canot pour la première nuit. C’est le lendemain qu’a eu lieu la répartition des appartements. À l’arrivée ce fut un choc et il a été très difficile de se faire des amies.

Nous logions à Planoise rue de Champagne dans un appartement du Crous. Dans mon appartement j’étais avec une Américaine, une Koweïtienne et une Nigérienne plus moi Uruguayenne. Pour nous comprendre nous étions ainsi obligées de parler français. Je me suis inscrite en licence de français à la faculté des lettres car mon niveau de connaissance du français était bon. Je partageais mon temps entre l’université pour les cours et le CLA pour l’audiovisuel.
Le début fut rude car nous étions en octobre et il pleuvait tous les jours. Dans l’appartement, je fus la première; les autres sont arrivées une semaine après. Mon père venait de décéder en 1974 juste avant et j’étais encore triste. Étant curieuse, j’ai visité la ville, j’ai essayé de me faire des amies auprès des étudiantes. C’est au bout d’une semaine que les cours commencèrent.
De 1975 à 1976, je n’ai connu qu’une seule famille française qui résidait à Morre. Étant chrétienne, j’allais à la messe à Saint-François-d’Assise à Planoise et c’est ainsi que j’ai fait connaissance avec le père Gilles alors curé de la paroisse. Il faisait des réunions avec les étudiants chrétiens et organisait des rencontres avec les familles du quartier au centre paroissial. Les étudiants organisaient ces soirées avec des chants des différents pays et des danses folkloriques.
En mai 1976, je suis allée en pèlerinage à Lourdes avec le père Gilles et quelques autres étudiants. Là-bas, j’ai fait connaissance d’un autre prêtre du diocèse et c’est lui m’a fait connaître mon futur mari.

Je suis repartie en Uruguay en octobre 1976 pour être à mon poste pour la rentrée scolaire dans une ville balnéaire ; l’école se trouvait au bord de la plage. C’est le 30 avril 1977 que je suis revenue en France pour épouser mon mari. J’ai pris un congé sans solde. Je me suis mariée en octobre 1977.

Après mon mariage j’ai poursuivi mes études : licence puis maîtrise d’espagnol avant de me lancer dans un DEA d’italien. Je suis devenue ainsi professeur d’italien et d’espagnol. Mon mari, veuf depuis quelques années, avait plusieurs enfants. Il était codirecteur de l’usine de découpage Model. J’ai eu deux filles, l’une en 1978 et l’autre en 1982.
Par la suite, avec deux amies j’ai monté une école de langues pour les jeunes enfants dans le quartier de Saint-Claude. II y avait un professeur d’allemand, un d’anglais, un d’italien, et moi pour l’espagnol. Nous avions trente enfants mais je dois dire que la majorité apprenait l’anglais. De trente enfants nous sommes passés à cent vingt, puis cela a diminué car le relais fut pris par l’Éducation nationale. 
Mon époux est décédé le 18 octobre 2008.
En Uruguay, c’était important d’apprendre une langue étrangère dès le plus jeune âge pour nous ouvrir sur le monde. Mon école de langues permet aux enfants de 5 à 11 ans de découvrir une autre langue que le français. Les cours durent une heure le mercredi ; en plus des enfants il y a quelques adultes.

Propos recueillis par le père Gilles et Alain Depardieu.

Montevideo, Uruguay

Besançon, Doubs, France

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