Je peux dire que je suis vraiment sauvé

Francisco Marcolino a fui l’Angola pour l’Italie puis la France. Après avoir appris le français, il est aujourd’hui en 1ere bac pro et s’adonne à sa passion : la peinture.


Dans mon pays, l’Angola il n’y a plus la guerre depuis 2002 mais on peut encore disparaitre ou être tué.


L’Angola a beaucoup de ressources pétrolières et minières ; c’est un pays riche mais ces richesses ne profitent qu’à une minorité autour du président qui a beaucoup de pouvoir.
C’est pour ça qu’il y a souvent des manifestations du peuple qui n’est pas content ; et quand on manifeste on est mis en prison, comme moi je l’ai été pendant 3 mois, même si j’étais mineur ; il peut y avoir des enfants de 10 ans emprisonnés ! On peut aussi être tué ou disparaitre, comme c’est arrivé à mon frère il y a 5 ans. Mes parents ont cherché partout dans les hôpitaux, les morgues, les prisons, ils ne savent pas ce qu’il est devenu. Et sur internet je vois aussi que ça continue; même quand tu ne manifestes pas, dès que tu es jeune, tu es recherché et emprisonné. C’est pour ça que mon oncle m’a aidé à fuir. Il a trouvé par l’intermédiaire d’un ami des vrais papiers d’identité assez ressemblants avec moi pour pouvoir me conduire en Italie.

J’étais mineur et je pensais pouvoir reprendre mes études en Italie.

L’ami de mon père m’a conduit d’abord au Maroc, puis en Italie ; il m’a laissé en me disant qu’à partir de maintenant je devais me débrouiller seul. La police m’a proposé d’être hébergé dans un grand centre avec plus de 200 étrangers ; même si c’était en février j’ai préféré rester dans la rue. J’y suis resté 7 jours. Et c’est là que j’ai rencontré un portugais avec lequel j’ai pu communiquer puisqu’en Angola (ancienne colonie portugaise) c’est la langue nationale. Il m’a dit qu’il avait envie de m’aider parce qu’il voyait bien que je n’étais pas voleur et que j’étais gentil avec lui. Comme sa femme est française ils habitent en France ; ils m’ont donc emmené à Briançon et là, leur fils m’a proposé de me conduire à Besançon où il vit. C’était il y a 3 ans. Quand on est arrivés il m’a déposé devant le commissariat où il m’a conseillé de tout leur expliquer. Et les policiers m’ont aidé en me confiant à l’ASE je crois ; j’ai vécu 8 mois dans un foyer où j’ai commencé à apprendre le français, parce que je ne le parlais pas du tout en arrivant. Puis j’ai été dans une classe d’accueil spéciale pour les étrangers UP2A et au bout de 3 mois la prof a dit que je me débrouillais assez pour aller en seconde générale au lycée Pergaud.
Et maintenant j’ai 18 ans, je suis en 1ere bac pro gros œuvre maçonnerie au lycée Pierre Adrien Paris. J’aime bien travailler dans le bâtiment, j’aime bien bouger et plutôt que rester chez moi pendant les vacances, je préfère faire des stages.

Je peux dire que je suis vraiment sauvé

Ma sœur qui est restée en Angola me dit parfois « ton copain untel a disparu ; ou le voisin a été tué par la police… » et quand j’entends ça, je me mets à sa place ; c’est ce qui aurait pu m’arriver ; c’est pour ça que je dis que je suis sauvé.
J’habite au FJT les oiseaux et j’ai un contrat avec l’ASE ; jusqu’à mes 21 ans je reçois 150 € par mois pour mes frais personnels et je continue à voir régulièrement mon éducatrice référente qui m’aide quand j’ai besoin. Je ne me sens pas tout seul, je me sens soutenu.
Je suis content  de pouvoir continuer les études et j’espère après trouver rapidement un travail.
Et si dans 5 ou 10 ans je pouvais rentrer dans mon pays parce que la situation aurait changé, ça serait bien.

Ce que j’aime aussi depuis que je suis tout petit, c’est peindre.

Mon oncle m’a beaucoup soutenu en m’offrant du matériel. Et quand je suis arrivé au foyer il y avait une éducatrice qui m’a appris des techniques, donné des conseils ; c’est comme ça qu’elle m’a proposé d’exposer des toiles pour la journée des réfugiés en juin dernier. Elle m’a beaucoup aidé mais comme elle a changé de travail je ne peux plus continuer avec elle.
Ces toiles que vous voyez là je ne les ai plus ; c’est le Conseil Général qui les garde ; elles sont accrochées dans une salle.

Témoignage de Francisco Marcolino recueilli par Geneviève Foex en janvier 2015

Angola, Afrique du Sud

Besançon, France

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