« Mon arrivée en France ? un calvaire ! »

La situation de guerre dans son pays d’origine, le Congo, a fait qu’elle a dû quitter l’Afrique avec sa fille, en laissant tout. En 2000, L … a demandé l’asile politique en France.


«  Un calvaire pire commence. Si j’avais su, j’aurais préféré mourir en Afrique pour ne pas vivre ce que j’ai vécu ici.
On sait d’où l’on vient, mais on ne sait pas où l’on va.
Je m’en suis sortie parce-que mes parents m’ont donné l’essentiel, une bonne éducation. Ils m’ont donné les armes pour avancer. On dit chez moi : éduquer une femme, c’est éduquer toute une nation. »

Difficultés scolaires .

Seule avec sa fille de 12 ans, sans argent, c’est le hasard des structures d’accueil qui les a conduites à Besançon.
Sa fille ayant été scolarisée depuis la maternelle dans un pays anglophone, son intégration à l’école en France a été très difficile. Les professeurs n’ont pas pris en considération ses difficultés de langue et d’adaptation, son échec était alors prévisible.
« Ma fille a trop souffert, si je n’étais pas dynamique, battante, je l’aurais perdue.
Elle est devenue rebelle,  j’ai frappé à toutes les portes pour la sauver.
Pour la protéger, j’ai obtenu une bourse pour la mettre en internat dans une école privée.
Avec mon RMI je mangeais des patates, je m’arrangeais ainsi pour payer le solde de l’internat, ma fille ne voyait pas ma situation difficile. Cela lui a permis de se remettre sur les rails.
Si j’avais les moyens, je ferais une association pour les femmes seules avec leurs enfants. Si on continue comme ça, on va tous les perdre ! Il faut donner à celles-ci les itinéraires à suivre, leur montrer les portes où frapper, les accompagner dans leurs démarches.
On ne peut pas être fier de ce qui se passe.
L’échec n’est pas celui des enfants, c’est celui des adultes, que l’on doit guider. Proposons aux parents des structures appropriées. L’école doit les sécuriser au lieu de les mettre en échec. Il faut tout faire pour les encadrer et les protéger. Le système a échoué, mais je crois que c‘est voulu ! Ne baissons pas les bras ! »

« J’étais cabossée… »

Pendant ce temps L… cherche du travail sans succès, essuie les insultes racistes, dans les transports, les services administratifs, se bat pour trouver un logement pour accueillir sa fille, pour ne pas être à la rue.
« Vous pouvez pleurer nue ici, personne ne vous écoute. J’ai toujours été très indépendante, battante, mais là, j’ai dû reconnaître ma défaite. Ma volonté m’avait permis de gravir les échelons, mais j’ai tout redescendu, jusqu’au négatif. J’étais dans le noir complet, épuisée physiquement, moralement et intellectuellement, comme si toutes mes batteries étaient à plat. J’étais cabossée, au point de ne plus avoir confiance en moi, j’étais réduite à rien. Je ne sais pas si je pourrai me reconstruire. Dans tout ce parcours j’ai subis des tortures morales, c’est pour nous décourager, cela fait partie des stratégies de l’immigration en France. Les immigrés des pays de l’est sont mieux traités que nous les africains.
Après avoir été broyée, je suis une survivante du système.
Je dis à ma fille : bats-toi pour faire partie de ceux qui décident !
J’ai une autre vision du monde, l’argent  n’est rien pour moi, il faut savoir ce que l’on veut, il faut se donner les moyens d’aller jusqu’au bout, sinon la vie est une mascarade. J’ai inculqué ça à ma fille. »

Sur sa route pleines d’embûches, quelques personnes et associations l’ont aidée, ainsi que le secours catholique, mais c’est sa foi surtout qui l’a soutenue, et la volonté de donner sa chance à sa fille.
L … a maintenant un logement ,un travail, des papiers. Mais elle ne se sent pas en paix, les batteries ne sont pas encore rechargées.
Il faudra du temps pour qu’elle retrouve  confiance en elle et en l’avenir.

Son témoignage a aussi pour but de redonner espoir aux personnes qui  connaissent les mêmes difficultés.

Propos recueillis le 3 février 2010 par Geneviève Cailleteau, témoignage anonyme.

Cameroun

Besançon, France

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